L’IA est depuis quelques années un buzz word qu'on utilise "à toutes les sauces" et elle a commencé à s’étendre dans tous les domaines de notre vie.
Au PMI et depuis 30 ans au PMI France, nous avons eu l’occasion d’observer et d’accompagner l’évolution des manières de travailler de notre Profession que ce soit sur les processus, les technologies et les soft skills nécessaires à l’excellence en Management de Projet.
A l’occasion des 30 ans de notre Chapitre, nous vous partageons notre vision sur l’IA, vision qui nous a permis d’impulser le Programme PMI France x IA composée d’une série d’initiatives dédiées à accompagner les professionnels du Management de Projet dans l’adoption et l’usage de l’IA au quotidien dans les différents pans de leurs activités.
De l’IA mythique à l’IA omniprésente
Il n’y a pas si longtemps, l’intelligence artificielle était perçue dans beaucoup de milieux comme une idée futuriste, un fantasme de science-fiction ou un gadget réservé à quelques laboratoires de pointe.
Dans les colloques et autres évènements, on évoquait surtout des cas d’usage spectaculaires tels que la reconnaissance d’images, les véhicules autonomes, les assistants vocaux — mais l’IA semblait encore loin de transformer nos organisations au quotidien et surtout sans aucune visibilité sur le potentiel ROI à part sur quelque cas bien particuliers.
Le mythe : promesses générales, peu de matérialisation
- Beaucoup de discours autour de l’IA se sont concentrés sur des promesses de « tout automatiser », « tout optimiser », ou « supplanter l’humain », sans préciser le « comment » ni la feuille de route réaliste ;
- Les cas d’application étaient souvent limités à des laboratoires de recherche, des départements R&D, ou des géants de la Tech disposant de data, d’infrastructures et de compétences rares ;
- Le discours principal posait l’IA en « boîte noire magique » : on parlait peu des conditions de données, d’éthique, de biais, de gouvernance, de robustesse ou d’intégration dans les systèmes existants et encore moins sur comment conduire des projets de transformation par l’IA ou des programmes ayant pour but de déployer l’IA au sein des organisations.
Une montée en puissance progressive
- Mais depuis quelques années, plusieurs facteurs ont transformé cette vision « mythique » en une réalité tangible :
Explosion des capacités technologiques
- Les progrès sur les grands modèles de langage (LLM), Chat GPT, Perplexity et autres, l’IA générative, les réseaux de neurones profonds, et les architectures de calcul (GPU, TPU, cloud) ont permis de franchir un seuil de performance et de coût accessibles ;
- Les outils, bibliothèques et plateformes (TensorFlow, PyTorch, Hugging Face, etc.) se démocratisent, rendant l’IA plus accessible aux organisations de toutes tailles.
Disponibilité et maturité des données
- Les entreprises collectent plus de données que jamais (CRM, ERP, IoT, logs, plateformes digitales…), et beaucoup mieux structurées, On commence d’ailleurs à parler de Data /IA car pas d’IA efficiente sans données de qualité et ordonnancées pour les bons usages ;
- L’émergence de pipelines de données, de la gestion de la qualité des données et de l’ingénierie des données permet de faire de l’IA un actif utilisable plutôt que de l’expérimentation.
Voies d’adoption pragmatiques
- Plutôt que de chercher l’« IA totale », de plus en plus d’organisations adoptent l’IA complémentaire — des assistants, des modules d’optimisation, des automates intelligents dans des processus existants ;
- Le concept d’« IA augmentée » — où l’IA assiste l’humain plutôt que le remplacer — s’impose dans de nombreux secteurs ;
- De plus en plus de plateformes no-code / low-code avec des briques IA rendent possible l’intégration rapide d’éléments intelligents.
- Alors qu’on martelait que l’IA allait tous nous remplacer, au PMI, nous sommes surtout convaincus que nous serons remplacés par des professionnels qui se seront formés à l’IA et auront compris les enjeux de son utilisation et nous avons conçu et déployé des ressources pour aider à cette montée en compétence.
Réflexion éthique, gouvernance et bien commun
- Le débat public et politique sur l’IA s’est intensifié — ce qu’illustre le Common Good Summit (organisé par Challenges, TSE, Les Echos-Le Parisien) qui rassemble depuis 2 ans décideurs économiques, chercheurs et représentants de la société civile autour des enjeux de croissance, responsabilité et bien commun.
- Les réflexions sur la transparence, l’algorithme responsable, les biais, la consommation énergétique, la réglementation (notamment européenne) ne sont plus accessoires mais centrales.
Ainsi, ce que beaucoup considéraient encore comme un « mythe » est aujourd’hui un changement de paradigme : l’IA ne se cantonne plus aux expérimentations isolées, elle traverse les processus, les métiers, les écosystèmes. Ce changement force à repenser les organisations, les compétences, la gouvernance, les partenariats et les modèles de création de valeur.
Impact sur le management de projet : la fonction transformée
Le management de projet (PMO, chef de projet, PO, …) occupe une position transverse, au carrefour des métiers, des ressources, du temps et des risques.
C’est donc naturellement une fonction qui est (et sera) profondément impactée par l’IA. Voici comment.
Où en sommes-nous aujourd’hui ?
- Selon une étude du PMI, 91 % des professionnels estiment que l’IA aura un impact sur le management de projet. Mais seuls 21 % disent l’utiliser pratiquement dans leurs projets ;
- L’IA se déploie déjà dans des tâches ciblées : planification assistée, estimation des coûts, prévision des risques, allocation de ressources, génération de rapports, suggestions d’actions correctives, etc ;
- Le PMI promeut déjà des programmes de formation « PMIxAI » pour aider les chefs de projet à devenir familiers avec les principes de l’IA et à l’intégrer dans leurs pratiques.
Les leviers de transformation
Voici quelques grands axes par lesquels l’IA redéfinit le rôle du professionnels du management de projet :
Axe | Transformation induite | Enjeux / conditions |
|---|---|---|
Automatisation intelligente | L’IA prend en charge les tâches redondantes (calendriers, suivi d’avancement, alertes, reporting, relances) | Il faut veiller à la qualité des données, à la robustesse des algorithmes et à la vigilance humaine |
Soutien à la décision / suggestions proactives | L’IA peut proposer des scénarios (réallocation de ressources, replanification, arbitrage), détecter des risques émergents ou des goulots | Le chef de projet doit rester « juge final » et comprendre les limites du modèle |
Planification et simulation prédictive | Capacité d’explorer des scénarios alternatifs, faire des simulations de sensitivité, ajuster les plannings en temps réel | Intégration continue des données réelles, modèles adaptatifs |
Ingénierie de prompts | Le manager devient un interlocuteur de l’IA (prompting) pour obtenir les bonnes suggestions ou analyses | Il faut maîtriser le « prompt engineering », tester et affiner les interactions |
Évolution des compétences | Les managers devront développer de nouvelles compétences : littératie des données, compréhension de l’IA, gestion éthique, agilité, collaboration interdisciplinaire | Besoin de formation, d’accompagnement culturel, de parrainage interdisciplinaire |
Gouvernance, éthique et responsabilité | L’IA impose des garde-fous : vérification des biais, traçabilité des décisions, transparence auprès des parties prenantes, auditabilité | Nécessité d’intégrer la dimension “IA responsable” comme critère de gouvernance |
Cas et limites à surveiller
- Projets IA vs projets traditionnels
Les projets centrés sur l’IA (développement de modèles, exploitation de données) ne respectent pas toujours les cycles “classiques” de projet : il faut adopter des modes plus exploratoires, itératifs, incrémentaux. Quelques travaux récents examinent la question de l’adaptation du PMBOK à l’IA, en soulignant des lacunes (gestion du cycle de vie des données, éthique, expérimentation) dans les méthodologies traditionnelles. - Qualité, biais, robustesse
L’IA, si mal calibrée, peut proposer des décisions biaisées ou non fiables. Le rôle du chef de projet est de valider, calibrer, auditer les suggestions, et de garder une supervision humaine. - Risque de sur-confiance et recul de l'esprit critique
L’automatisation et l’« intelligence » peuvent induire un effet de sur-confiance : on peut accepter les suggestions d’un modèle sans les questionner. Il faut maintenir une posture critique. - Intégration à l’existant
L’IA doit s’intégrer dans des systèmes hétérogènes (ERP, CRM, outils métier) ; le changement technologique et le changement culturel doivent aller de pair. - Adoption inégale selon les contextes
Certains secteurs, certaines tailles d’organisation ou certains types de projets (fortement règlementés, sensibles, à faible volumétrie de données) auront plus de frein à l’adoption
Vers un rôle de professionnel du management de projet augmenté par l’IA
Pour réussir cette transition, voici quelques orientations que nous avons prises au PMI et au PMI France :
- Adopter progressivement : ne pas viser l’IA “tout de suite”, mais commencer par des cas d’usage modestes, à forte valeur, bien délimités, pour bâtir la confiance et les compétences ;
- Former et accompagner : proposer des formations internes ou externes sur les principes de l’IA, la gouvernance, le prompt engineering, la gestion des données, les biais, etc ;
- Instaurer une gouvernance IA : définir des comités de pilotage, des audits internes, la responsabilité des données et des modèles, des indicateurs de performance et d’éthique ;
- Construire des partenariats pluridisciplinaires : associer experts data, métiers, juristes, experts en éthique dès la conception des projets IA ;
- Évoluer vers une posture stratégique : le professionnel du projet, en comprenant les capacités de l’IA, peut jouer un rôle de “facilitateur de transformation” en intégrant l’IA comme levier dans la feuille de route de l’organisation ;
- Cultiver l’agilité et l’expérimentation : accepter l’échec comme source d’apprentissage, itérer, pivoter, ajuster les modèles, les processus et l’organisation.
Au fil du temps, nous sommes passés d’une vision de l’IA comme un mythe technologique à une réalité qui redessine les fondations de nos modes de travail, nos écosystèmes, et nos compétences.
Le management de projet est au cœur de cette transformation : non seulement il sera profondément remanié, mais il peut devenir un levier central de la gouvernance et de l’adoption responsable de l’IA.
Pour découvrir toutes les ressources autour de l'IA mise à disposition par le PMI et le PMI France, consultez l'article dédié de notre newsletter de Septembre 2025.
La deuxième saison de notre série de webinaires Horizons IA a commencé jeudi 25 Septembre autour des Agents IA. Vous pouvez consultez tous les replays d'Horizons IA sur notre Chaîne You Tube. Bon visionnage !